Douze fleurs #12 – Sacrificium vespertinum


Vous avez, mon Seigneur, expiré sur la croix
Et seul Votre cadavre est encor sur le bois.
Que n’avez-Vous offert dans ce grand sacrifice ?
Le corps, l’âme, l’esprit, la qualité de Fils,
Les amis, les habits… mais ce n’est point assez,
Vous voudriez offrir et ne jamais cesser.
Vous prenez un soldat issu de la cohorte
Qui, venu pour briser les jambes qui Vous portent,
Étonné de Vous voir mort en si peu de temps,
Donne un grand coup de lance à ce cœur qui l’attend.
Voici le sang et l’eau qui coulent ; même mort,
Ô suprême bonté ! Vous Vous donnez encor.

Douze fleurs #11 – Caeca


Vous voici, mon Seigneur, expirant sur la croix
Devant la création interdite d’effroi.
Les anges, en secret, devant un tel mystère,
Jettent sans hésiter leur front pur sur la terre.
Aveugle aussi longtemps que le Christ a vécu,
Le démon dessillé se reconnaît vaincu.
Le ciel vient se charger de profondes ténèbres,
La terre retentit d’un craquement funèbre
Et l’animal lui-même, apeuré, silencieux,
Sait indistinctement que meurt le Roy des Cieux.
Toute chose ressent combien le crime est noir,
Seule l’humanité demeure sans rien voir.

Douze fleurs #10 – Ecce Rex


Vous voici, mon Seigneur, élevé sur la croix.
Que j’ai de peine, hélas, à reconnaître un roi
Dans ce corps recouvert de milliers de blessures,
Dans ce corps violacé de mille meurtrissures,
Dans ce corps violenté tout désarticulé,
Dans cette chair exsangue et de sang maculée,
Dans cette chair offerte aux regards les plus vils,
Dans cette chair hideuse, impotente et débile.
Où donc est le pouvoir des miracles soudains ?
Où donc sont le Thabor et les eaux du Jourdain ?
Mais de cette colline où la potence saigne,
Le Christ omnipotent juge, triomphe et règne.

Douze fleurs #9 – Quem Jesus diligebat


Vous voici seul, Seigneur, élevé sur la croix.
Avec Vous au Thabor vos amis étaient trois :
Hélas, il n’en est qu’un qui persiste et demeure
Aux pieds du supplicié cependant qu’il se meurt.
Celui qui reposait sa joue sur Votre sein
Se tient tout innocent parmi Vos assassins.
Il n’importe d’avoir de la force ou de l’âge :
C’est de Vous, ô Seigneur, qu’il tire son courage.
Puissé-je être fidèle à mon tour comme lui
Et ne point fuir au loin lorsque viendra la nuit !
Jésus ! Prenez mon âme, agissez en avare,
Et gardez-la comme saint Jean sous vos regards.

Douze fleurs #8 – Crux praefigurata


Vous voici, mon Seigneur, sur cette noble croix
Que l’Écriture Sainte annonça douze fois :
Voici de Mardochée la potence outrancière
Et le bois qu’Élisée prit pour ôter le fer ;
Les voici, les piliers que Samson renversa ;
Le voici, le piquet que Jahel enfonça ;
Voici Moïse aidé par Jésus et par Hur,
Et le serpent d’airain qui guérit les blessures ;
C’est l’autel où le prêtre offrait le veau bien gras,
L’échelle de Jacob et la croix de ses bras ;
C’est le bois d’Isaac et de l’arche bien pleine,
C’est l’arbre du salut brisant l’arbre d’Éden.

Douze fleurs #7 – Crucem videre


Mon ange, conduisez mon âme à cette croix
Où le Dieu tout puissant rend Son âme pour moi.
Montrez-moi le ciel noir qui se ferme et menace,
Montrez-moi la colline avec la populace ;
Montrez-moi les soldats jouant Ses vêtements,
Montrez-moi les larrons peinant horriblement ;
Montrez-moi Ses amis au pied de la potence,
Montrez-moi le soldat qui prépare sa lance ;
Montrez-moi tous ces fous qui Le voient et se rient ;
Montrez-moi le Seigneur et qui parle et qui crie,
Oh, montrez-moi ce corps accablé de douleurs,
Et surtout montrez-moi la bonté de Son cœur !

Douze fleurs #6 – Rogatio


Voici que, mon Seigneur, élevé sur la croix,
Vous tournez vers le Ciel le regard et la voix.
Fils unique, exigez du Maître des vengeances
Qu’Il jette dans l’enfer cette funeste engeance
Qui, d’audace effrénée, Vous condamne au trépas,
Se rit de Vos malheurs et ne se repent pas.
Oh, réclamez du moins ce que les Juifs demandent
Et dites : « Permettez qu’à présent Je descende. »
Mais non, tout affaibli, dans Votre fermeté,
Vous ne songez jamais qu’à cette humanité
Pour laquelle, grand Dieu, Vous mourrez tout à l’heure,
Et Vous Vous écriez : « Père, pardonnez-leur. »

Douze fleurs #5 – Sitio


Voici que, mon Seigneur, élevé sur le bois,
Vous versez Votre sang par mil plaies à la fois,
Vous êtes recouvert de gouttes de sueur
Et Vous n’avez point bu depuis plus de dix heures.
Or, la gorge asséchée comme un ruisseau d’été,
Vous murmurez : « J’ai soif. » à qui veut écouter.
On Vous présente alors un curieux élixir,
Une éponge imbibée de vinaigre et de myrrhe.
Vous refusez de boire une telle boisson,
Non pour son mauvais goût, mais de cette façon
Vous voulez faire entendre à nos âmes cruelles :
« J’ai beaucoup moins soif d’eau que de vous voir au Ciel. »

Douze fleurs #4 – Justus


Vous voici, mon Seigneur, élevé sur la croix,
Entre deux criminels condamnés par la loi.
L’âme de l’un est noire et si remplie de vices
Qu’il est digne à coup sûr de ce premier supplice
Et du second sans fin et plus grand qui l’attend
Lorsqu’il aura rendu son esprit à satan.
L’autre, qui s’humilie sous vos yeux salutaires
Mérite néanmoins ce châtiment sévère
Puisque, ne craignant point d’attaquer l’innocent,
Il en prenait la bourse et répandait le sang.
Mais Vous, qu’avez-Vous fait, ô Juste magnanime ?
– Je porte dans Ma chair le fardeau de tes crimes.

    Douze fleurs #3 – Stabat Mater


    Voici, Mère éplorée, votre fils sur la croix.
    De quels cruels tourments votre cœur est la proie !
    N’est-ce pas Lui, l’enfant que vous vêtiez de langes,
    Et qu’acclamaient au ciel les milices des anges ?
    N’est-ce point là l’enfant que nourrit votre sein
    Que les mages d’orient montrèrent trois fois saint ?
    Et n’est-ce pas des fils le plus parfait exemple
    Qui, disparu trois jours, fut trouvé dans le temple ?
    Ô Mère, quelle vue vient embraser vos yeux !
    Votre tout petit meurt sur un gibet odieux !
    Mais déjà, L’admirant couché dans la mangeoire,
    Vous songiez : « C’est l’agneau qui naît pour l’abattoir. »

    Douze fleurs #2 – Clavis


    Vous voici, mon Seigneur, étendu sur la croix.
    On étire Vos bras, on écarte Vos doigts,
    On pose un clou grossier sur Votre paume ouverte,
    On prend un lourd marteau et, d’une main experte,
    On donne un violent coup qui déchire la peau,
    Déchiquette les chairs et disloque les os.
    Mais c’est trop peu d’un coup, il en faut un deuxième,
    Il faut ficher la pointe au cœur du bois lui-même,
    Et Vous qui supportez ces atroces tourments,
    Vous descendez Vos yeux sur l’horrible instrument,
    Sur la main qui le tient toute crispée de haine
    Et me dites : « Mon fils, cette main, c’est la tienne. »

    Douze fleurs #1 – Corona aurea


    Vous voici, mon Seigneur, élevé sur la croix,
    Dévêtu et livré aux atteintes du froid,
    Mais le front recouvert de ce diadème atroce
    Qu’a tressé d’un soldat la main dure et féroce.
    Ah, si l’on m’avait mis un pareil ornement,
    Seigneur ! j’aurais poussé d’horribles hurlements.
    Vous restez en silence en souffrant ce grand mal,
    Vous souffrez qu’on attente à la grandeur royale,
    Et Vous demeurez ferme au milieu des huées.
    Oh, qui voit qu’un rayon transperce les nuées
    Et frappe le sommet de l’instrument de mort
    Pour montrer la couronne avec ses pointes d’or ?

    Demande de prières

    Cher lecteur, ayez la bonté de prier pour ma fille Marie-Lys, âgée de huit ans, qui souffre d’une épilepsie grave et potentiellement incurable : les médicaments n’ont pas d’effet sur elle et elle ne pourra être guérie que si on peut l’opérer, ce qu’on ne pourra savoir que dans deux à trois semaines environ. Que Dieu vous bénisse !